Gladiator, Gladiator II et ma nostalgie

Une histoire d’affection, de souvenirs et de désillusions

Gladiator © Dreamworks/Allstar

Je sais qu'il me reste beaucoup à vivre, à apprendre et à expérimenter. Cependant, du haut de mes 31 ans, je suis consciente qu’il y a des romans, des chansons et des films qui resteront avec moi, gravés à jamais. Certains, je l’avoue, un peu malgré moi car ils m’ont un peu traumatisée, comme Orange Mécanique et Rox et Rouky. D’autres sont si proches de mon cœur et de mon vécu, que je les oublie parfois, comme des tatouages. Cinéma ParadisoLa La Land et Live Forever me viennent immédiatement en tête. 

Mais surtout, il y a Gladiator

Ce qui est assez fou, c’est que je ne suis pas certaine qu’il soit dans un top 5 de mes films préférés. Toutefois, il occupe une place de choix dans mon panthéon personnel, genre celle qui a une vue sur la mer et peut capter les derniers rayons du soleil avant qu’il ne disparaisse. Vous voyez le genre ?

La première fois que j’ai vu ce film, je devais avoir 12 ans. C’est assez cocasse et peut-être un peu étrange, mais je me souviens plutôt bien de ce jour. J’étais chez ma meilleure amie de l’époque. Elle a glissé le DVD dans le lecteur et de façon assez magique, en deux-deux, on s’est crues dans la Rome antique. Nous avons tout vécu à fond et sommes passées par une multitude de sentiments : la colère contre Commode, la fascination, le dégoût, les larmes, la peur... On a appris certaines répliques par cœur, comme le monologue du casque qu’on a recopiée méticuleusement sur un carnet, mot pour mot. Et que je pourrais encore réciter aujourd’hui, même si je n’irai peut-être pas m’en vanter dans les diners mondains. Si un jour je vais dans des diners mondains. 

Et bien sûr, on a découvert Maximus

Ne passons pas par quatre chemin, le héros incarné par Russell Crowe a eu un effet dingue dans nos têtes d’adolescentes. Était-ce dû à son charisme ? Sa force, son courage et son humanité ? Sa jupette et son armure ? Ses muscles et son sourire ? Ma foi, probablement un mix de tout cela. Son statut de combattant et son amour pour sa famille ont fait indéniablement de lui un personnage inoubliable.

J’ai depuis revu, sans mentir, au moins vingt fois ce péplum de Ridley Scott. D’aucun.e.s diraient peut-être que ça tient de la fixette et iels n’auraient pas tord. Néanmoins, je ne vais pas m’en priver, chaque visionnage réveillant en moi une vague d’émotions intenses et un plaisir presque coupable de revivre encore et toujours la même histoire épique.

Ajoutons à cela la musique d’Hans Zimmer, la main qui passe dans le champ de blé, les combats intenses, les décors, les quelques plans un chouïa kitschs, les belles robes de Lucilla... et l’on se retrouve avec un film qui n’est pas seulement gravé dans mon cerveau, mais tient du chef-d’œuvre

Alors, quand j’ai appris qu’une suite allait voir le jour, 24 ans après le premier, avec Paul Mescal et Denzel Washington en plus, j’ai été envahie d’excitation et d’impatience. Le jour-même de sa sortie, j’ai donc promptement été découvrir Gladiator II. Trois heures plus tard, en retrouvant l’air frais et pollué des rues parisiennes, une question s’est mise à me trotter en tête : ce second opus était-il vraiment nécessaire ? Bon, probablement pas, contrairement à ce que doit se dire Ridley Scott qui envisage déjà un troisième volet, mais je me suis dit que la nostalgie était vraiment quelque chose de fascinant. 

Elle est partout dans nos vies, c’est de la confort food en barre, qui fait sacrément bien vendre. Les exemples de cela, on en a à la pelle, tous les jours : la Star Academy s’est réinstallée dans le paysage télévisuel, Lorie fait son retour, les Tokio Hotel font une émission de télé-réalité et Hollywood mise à fond sur les suites et remakes, comme nous le prouvent GhostbustersBeetlejuice 2 et Matrix Resurrections

Tous ces projets, personne ne les a demandé finalement, mais ils font un carton - y compris auprès de moi, pas de mégarde, je ne juge personne. Seulement, avouons-le tout de go, cette stratégie a ses limites. La nostalgie, c’est bien chouette mais cela élève nos attentes et tout compte fait, ne suffit pas toujours à recréer la magie. 

Gladiator II en est la preuve parfaite. Le principal témoin ? Ma déception - multipliée par deux, car, magnanime, je suis retournée le voir hier, bien décidée à lui donner une seconde chance… qui s’est avérée infructueuse. 

"Ce que l'on fait dans sa vie résonne dans l'éternité."

Mais alors, que raconte ce second opus ? En gros, seize ans après la mort de Maximus, son fils Lucius vit en Numidie, ancien royaume situé principalement en actuelle Algérie. Lors d’une attaque menée par l'armée romaine, la femme de Lucius meurt et notre héros est réduit à l’esclavage. Il se retrouve contraint de combattre comme gladiateur pour Macrinus, un ancien esclave ambitieux qui complote pour trouver une place coquette au sein de l’élite romaine.

Ce résumé vous évoque quelque chose ? Normal, Gladiator II, et c’est là son plus gros souci, existe pour et par son grand frère. C’est bien simple, l’histoire est proche de la redite. Les personnages sont souvent des prolongements ou des ombres de ceux qu’on connait déjà. Même les protagonistes féminins ont une importance similaire. Le test de Bechdel n'est d’ailleurs pas respecté - il aurait fallu pour cela, qu’au moins deux femmes nommées parlent ensemble, de quelque chose sans rapport avec un homme. En 2024, on aurait pu espérer que ce soit le cas.

Les scénaristes étaient-ils en vacances lors de la conception du film ? Ou alors, iels ne se sont juste pas cassé.e.s la tête, je ne sais pas.

Iels se sont notamment dit : “Tiens si on disait que Lucius était le fils de Maximus” ?! Alors, en soi, pourquoi pas, mais d’où ça sort ? Dans le premier film, on ne nous présente jamais aucun lien explicite entre eux-deux. Maximus n’avait qu’une envie, c’était de rentrer chez lui en Espagne, auprès de sa femme et de son fils. Lucius, du même âge que ce dernier, vit à Rome, avec sa mère Lucilla. Donc on peut en penser ce qu’on veut, moi, j’appelle cela une grosse ficelle tirée par les cheveux. M’enfin, s’il n’y avait que ça. L’héroïsme et le leadership de Lucius semblent être une évidence mais sortent absolument de nulle part. En ce qui concerne la musique, Hans Zimmer est aux abonnés absents, ce qui se fait cruellement ressentir.

Ceci étant dit, tout n’est pas à jeter. Du grand spectacle, du divertissement, on en voulait, on est servi.e.s. Ridley Scott ne s’est rien refusé et a ramené des singes chelous, des rhinocéros, ainsi que des requins dans l’arène. Paul Mescal, qui fut révélé par Normal People, est très convaincant en Lucius. Il est intense, brutal, taiseux, tout en apportant une certaine sensibilité et une profondeur. Puis-je tout de même avouer que je le préfère dans Sans jamais nous connaitre et Aftersun ? Denzel Washington, quant à lui, se régale dans le rôle de Macrinus et captive chaque fois qu’il est à l’écran.

J’étais, de plus, ravie de trouver des flashbacks avec Russel Crowe. Certain.e.s diront peut-être que c’est une béquille scénaristique, mais qu’importe, j’avais l’impression de retrouver à la fois un vieux copain et un crush de mes jeunes années. Et ça, c’est rare et précieux, n’est-ce pas ?

Gladiator II © 2024 Paramount Pictures

Si Gladiator II ne parviendra donc jamais à s'imposer outre-mesure dans mon cœur, il m'a rappelé pourquoi l'original restera à jamais un film à part. Parce qu’au fond, comme Cinéma Paradiso nous le rappelle, l’immense talent du cinéma réside dans sa capacité à éveiller en nous des émotions profondes, à marquer nos esprits, à travers des personnages, des scènes ou des musiques qui résonnent, même longtemps après. Gladiator a fait tout cela pour moi, à un âge où je me construisais. Il continue de le faire et c'est ce qui le rend inoubliable. 

Et ça, rien ni personne ne pourra jamais l'effacer. 

Donc merci Gladiator et FORCE ET HONNEUR.

Aviez-vous déjà vu un aussi joli t-shirt ?! 🤓

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